lion Notice nécrologique pour Théophile Lejeune
par Léopold Devillers en 1885
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Contexte

 


Théophile Lejeune est décédé à Estinnes-au-Val le 15 septembre 1885 (source : wikipedia.fr).


Lors de la cérémonie d'inhumation le 18 septembre, Léopold Devillers, Président du "Cercle d'Histoire et d'Archéologie de Mons", lui a dédié un très émovant discours .


Cette notice nécrologique a été publiée dans le tome XX des "Annales" du Cercle (1887) et c'est avec l'accord de Monsieur Jean-Marie Cauchies, le Président en exercice du "Cercle d'Histoire et d'Archéologie de Mons", que je remercie vivement par la présente, que vous en trouverez la publication ci-après.






cercle archeologique mons

Cercle Archéologique de Mons

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Notice nécrologique pour Théophile Lejeune  par Mr Devillers
Annales du Cercle Archéologique de Mons - Tome XX

 
Une foule considérable se pressait aux funérailles de M. Théophile Lejeune, qui ont eu lieu à Estinnes-au-Val, le 18 septembre 1885. Avant la levée du corps, M. Devillers, président du Cercle Archéologique, a prononcé le discours suivant :

« Messieurs,

« Je viens remplir un douloureux devoir, au nom du Cercle Archéologique de Mons dont M. Lejeune était l’un des membres les plus dévoués. Mais ce n’est pas seulement l’éloge d’un collègue estimé et de ses nombreux travaux que je désire faire ; je tiens avant tout à rappeler les qualités du cœur, le caractère sérieux de notre cher défunt.

« Enfant des Estinnes, Théophile Lejeune a porté très haut l’amour du sol natal. L’école primaire du village conserve des traces profondes de son intelligente direction, et la croix de chevalier de l’Ordre de Léopold, qu’il reçut en 1870, dit assez qu’il était considéré comme un instituteur modèle.

« Mais tout en s’acquittant de ses fonctions avec un soin scrupuleux, M. Lejeune consacrait une partie de ses rares loisirs à l’étude de l’histoire locale. Ses recherches lui dévoilèrent bientôt des faits qui élevaient dans l’histoire le nom de Leptines. Rempli d’admiration, il étendit de plus en plus ses investigations et se livra à des fouilles. C’était pour lui un bonheur indicible de scruter le passé de son cher village et des localités qui l’environnent. Travailleur infatigable, il étendit le cercle de ses explorations. Sa première publication eut pour titre : Coup d’œil géographique, statistique et historique sur le canton de Roeulx, et parut en 1853.
« Par un beau jour d’été de la même année, nous contemplions ensemble le magnifique paysage duquel se détachent si gracieusement les Estinnes, Bonne-Espérance, Binche, Waudrez et leurs environs. L’aspect de ces lieux révélait toute une série d’études. En me serrant la main, Lejeune me confia que son ambition était de pouvoir publier successivement l’histoire du territoire que nous avions sous les yeux.

« Nous recherchâmes dès lors les moyens de publicité qui pouvaient le mieux servir, dans notre province, les intérêts des sciences historiques. Lorsque notre Cercle Archéologique fut fondé, en 1856, Lejeune fut des premiers à apporter sa collaboration à cette institution dont les résultats ont été si fructueux. Le premier volume de nos annales s’ouvrit par son Aperçu sur le Hainaut. Nos volumes suivants s’enrichirent d’autres travaux dus à sa plume aussi féconde que savante. Je citerai les plus importants : les monographies des villages des Estinnes, de Bray, de Boussoit et de Familleureux ; des anciennes abbayes de Lobbes, de l’Olive, de la Thure et du Roeulx ; des sceaux de la ville de Binche, des rétables de l’église de Buvrinnes, du parc de Mariemont, de N.-D. de Cambron, et ses rapports sur des découvertes d’antiquités.

« Lejeune a, de plus, mis au jour : dans les Annales de l’Académie d’archéologie de Belgique, des Recherches sur la résidence des rois franks aux Estinnes ; - dans les Documents et rapport de la Société archéologique de Charleroi, la Description historique et archéologique du canton de Binche, diverses notices et une nouvelle édition de sa monographie de Lobbes ; - dans la revue de l’art chrétien, une notice sur le monastère de Bonne-Espérance, et sur les édifices religieux de Lobbes.

« Deux de ses mémoires ont obtenu la médaille d’or aux concours annuels de la Société des sciences, des arts et des lettres du Hainaut, qui lui décerna le diplôme de membre, en 1858. L’un de ces mémoires contient l’Histoire de la ville de Soignies et l’autre, l’Histoire de la ville de Binche.

« Tous ces travaux sont marqués au coin de l’érudition. Leur auteur avait pour guides la méthode et un jugement sain. Son style, parfois chaud et imagé, est toujours correct.
« Pour clore cette revue rapide des œuvres de M. Lejeune, je dois ajouter qu’il laisse de nombreux écrits et une infinité de notes puisées à des sources authentiques. Il avait fait tirer à part des exemplaires de ses principales publications, sous le titre de : Monographies historiques et archéologiques de diverses localités du Hainaut. Ce recueil, qui est déjà vivement recherché des amateurs, contient à ce jour les tomes 1 à 5 et 7. Le tome 6, qui n’a point paru, était réservé à une chronique historique des seigneurs de Roeulx, qui est presque achevée et qui pourra être imprimée.

« Vous le voyez, Messieurs, les loisirs de M. Lejeune ont été bien remplis. Le programme de ses études a été réalisé. Notre ami pouvait certes espérer au repos. Sans rompre complètement avec ses habitudes de travail, il nous aurait fait profiter longtemps encore du concours de ses lumières. Mais la mort impitoyable est venue briser brusquement cette noble existence !

« Homme de bien, d’une droiture rare, Lejeune laisse à sa famille éplorée et à nous tous des exemples à imiter.

« La commune d’Estinnes-au-Val voudra, j’en suis sûr, perpétuer sa mémoire. Elle n’oubliera pas tout ce que Lejeune a fait pour vulgariser l’histoire du pays.

« Avant de nous séparer des restes mortels de notre bon collègue et ami, écoutons-le, Messieurs, lorsqu’il nous dit dans la préface de son histoire des Estinnes :

« Lestines ! A ce nom dont l’éclat se reflète dans nos annales, quel est le cœur qui palpite sans éprouver une douce émotion ? Lestines ! Nom entouré d’une auréole de gloire, cher au chroniqueur, à l’historien, à l’érudit, à l’antiquaire, à l’archéologue, au poète, au touriste, en un mot, à tout homme d’intelligence dont l’âme est ravie en présence d’une célébrité historique. Quand l’amateur entend ce nom, une vive curiosité s’empare de son être, et il désire ardemment de connaître l’origine et les destinées de ce délicieux séjour des rois. Nous, heureux habitant de Lestines, qui avons consacré nos veilles à cette étude, nous sommes fiers de fouler un sol sur lequel semblent encore empreints les pas des hommes illustres qui s’y rendirent ou s’y fixèrent à diverses époques. Nos aïeux avaient confiés à leurs descendants le précieux dépôt de la tradition qui concerne cette résidence royale, mais que de souvenirs frappants, que de détails curieux, que de particularités intéressantes, que d’événements remarquables leur ont échappé et que nos compatriotes seront heureux de lire et d’apprendre à leurs enfants ! »

« Et en terminant son remarquable mémoire, il émet un vœu cher à son cœur ; il espère qu’un jour, s’inspirant d’un vrai patriotisme, les administrations des deux villages se concerteront pour perpétuer, par l’érection d’une pyramide quadrangulaire, les souvenirs historiques qui font la gloire des Estinnes ! Ce vœu, nous le renouvelons sur sa tombe et en son nom, et nous demandons à la commune d’Estinnes-au-Val d’y applaudir et d’ajouter sur la face réservée aux noms glorieux de Lestines celui de l’homme distingué qu’elle vient de perdre.

« Adieu, Théophile Lejeune, adieu ! »
    
signature devillers
Leopold Devillers









Devillers
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